Tu fais des sorties longues à vélo, motivé par les beaux jours de l’été ? Tu t’es inscris à une cyclosportive et tu comptes bien battre ton record de kilomètres ? Alors peut-être as-tu peur d’un truc qui terrorise tous les cyclistes et sportifs d’endurance : la fringale. Julien Louis, nutritionniste de l’équipe DECATHLON – AG2R LA MONDIALE, t’explique pourquoi, si tu t’alimentes bien et anticipe les problèmes, il ne risque rien de t’arriver. Alors écoute les conseils du pro !
Déjà, Julien, c’est quoi au juste une fringale ?
La fringale, c’est la situation d’épuisement des réserves énergétiques du coureur. En gros, c’est le glycogène, le stockage du sucre dans l’organisme, qui voit son niveau s’effondrer. Souvent, cela va s’associer à une hypoglycémie, et le corps va se mettre à puiser dans les graisses plutôt que dans le sucre pour fournir de l’énergie aux muscles et au cerveau. Or, ces graisses, elles n’ont pas un bon rendement et petit à petit, la capacité à maintenir l’intensité de l’effort va chuter. La fatigue va augmenter, et différents signaux vont se manifester : des tremblements, un mal de tête, une vision trouble, des douleurs musculaires… Tu perds ta vigilance, et il faut alors agir très vite. Tu es comme une voiture sur la réserve de carburant : il faut rapidement aller à la pompe, sinon c’est la panne sèche.
Il se passe quoi, dans la tête, quand on a une fringale ?
On ne le voit pas vraiment venir. Il n’y a pas vraiment de signes avant-coureurs à l’effort. C’est juste le foie qui se met à taper dans un autre type de carburant, qui est donc présent dans les graisses, et il ne va pas envoyer de signaux au cerveau avant la première manifestation de faiblesse. Tu sens alors ton allure se réduire, car puiser dans les graisses demande plus d’énergie. Ta concentration va décliner. Tu peux aussi voir ta fréquence cardiaque augmenter. Insister est alors contre-productif : ça ne sert à rien d’essayer de continuer sans rien faire. Tu vas aggraver ton cas et tu peux même finir par tomber du vélo.
Ça vous arrive, parfois, chez les pros ?
Franchement, ça arrive de plus en plus rarement, voire même jamais. Avec la présence de nutritionnistes dans les staff, et d’assistants très nombreux en bord de route, on est prémunis contre ce danger. En revanche, chez les amateurs ou les cyclosportifs, ça peut arriver si la personne manque de notions à ce sujet et fait moins attention. On assiste aussi, encore, à des fringales dans des disciplines telles que les marathons.
Alors concrètement, comment on l’évite, cette fichue fringale ?
En s’alimentant ! La nuit, tu diminues fortement tes réserves de glycogène au niveau du foie. Avant un effort d’endurance, la première chose est donc bien évidemment de manger. Le petit-déjeuner va être un repas capital avant une sortie longue, pour dès le départ augmenter ses chances de garder le réservoir suffisamment plein. Il faut également, sur le vélo, disposer de cartouches : gel, barre, bidon de boisson énergétique… C’est indispensable pour se sortir d’une situation difficile.
Et on fait quoi ? On attend de se sentir faible pour manger ou boire ?
Surtout pas ! Il faut être structuré, suivre un plan, en anticipant la diminution des réserves de sucre. Le mieux est de définir que tu vas t’alimenter toutes les x minutes, et de respecter ce schéma. Si tu écoutes tes sensations, ça va être trompeur : ton corps ne va t’envoyer un signal qu’une fois qu’il sera déjà en train de manquer d’apport. Même les cyclistes professionnels, il faut parfois les pousser à bien respecter cette stratégie nutritionnelle, donc imagine les cyclosportifs… Il ne faut pas négliger cela. La clé, ça va être la régularité. Une gorgée régulière. Manger peu mais souvent. Si malgré cela, tu fais un jour une fringale, crois moi que la fois suivante, tu vas apprendre cette erreur et ne pas la rééditer.
C’est donc le cas si je participe à une cyclosportive en montagne ?
Oui, c’est intense, avec des cols, du chaud et même parfois du froid. Tu vas brûler plus de calories et donc tu vas devoir manger et boire plus que d’habitude. Si tu foires ton coup, porté par ton enthousiasme, prends le temps de t’arrêter quelques instants et prends quelque chose de sucré au plus vite. Le plus efficace, c’est ce qui est liquide car ce sera assimilé plus vite par ton organisme : un jus, un soda, un gel… Ou bien du solide tel qu’un fruit, par exemple une banane, ou même un bonbon. Le taux de sucre peut chuter, mais peut aussi vite remonter. Tout est donc bon à prendre pour éviter cette satanée fringale !
Y a-t-il des contextes dans lesquels on s’expose plus à la fringale ?
Il y a des facteurs de risque, oui. Si tu n’as pas fait attention à ton alimentation la veille, si t’as mal dormi, si t’es sorti tard… Il y a aussi une sensibilité plus marquée chez certains : tu peux être plus sujet à l’hypoglycémie qu’un autre. Certains sportifs sont incapables de rouler à jeun, d’autres le peuvent. Il faut donc bien te connaître, savoir ce qu’il te faut pour te sentir bien. La chaleur peut aussi jouer, ainsi que l’altitude. Dans des conditions difficiles, tu as besoin de plus d’énergie, tu dois manger et boire plus.